Mririda N’aït Attik (1940)- Fleurs émondées
Mes yeux, ils ont tant pleuré, mes yeux
Qu’ils n’ ont plus de larmes, mes yeux
Pour notre petite Izza, on a compté neuf fois la moisson
Et le troupeau est monté neuf fois aux pâturages d’été
Pour notre petite Izza, on ne comptera plus les moissons
Ni les départs du troupeau vers les bergeries d’été
Désormais, on comptera les années qu’ elle nous a quittés
Sa tombe est là-haut, dans la terre rouge du cimetière
Elle est aussi au plus profond de mon coeur
Izza, je la revois partout où que j’aille
Et ma tête est pleine de sa voix et de ses rires
On dit : Le figuier où Izza venait chercher l’ombre…
On dit : Le seuil des ancêtres où Izza triait le maïs
Et le soufflet bruyant, le jeu qu’elle aime à la prime aube
Pour réveiller le feu prisonnier sous les braises
Et le vieux miroir fêlé où jour après jour
Inquiète et pensive, elle regardait venir sa mort
Tout arrive par la volonté de Dieu
Dans un léger linceul teint au safran
On l’a emportée, on a emporté Izza
Depuis ce jour – que la volonté de Dieu soit ! –
Je suis comme un arbre sans feuilles, une maison sans feu
Mes yeux, ils ont tant pleuré, mes yeux
Qu’ils n’ont plus de larmes, mes yeux
Traduction : René Euloge.
Pour en savoir plus sur cette poétesse berbère méconnue, je vous invite à consulter l’article de Fatéma Chahid (lien ci-dessous) et à lire Les chants de la Tassaout de Mririda N’aït Attik(préfacé par L. S. Senghor) : https://femmesdumaroc.com/femmes-du-monde/mririda-nait-attik-la-poetesse-rebelle-amazighe-59560